L’eau en Egypte : un enjeu de société
L’Egypte est un territoire de tous les contrastes : si le Nil est le plus long fleuve du monde (environ 6700 km pour un débit moyen d’environ 1000 mètres cubes par seconde), et si le pays est bordé à la fois par la Mer Méditerranée et la Mer Rouge, 95% du territoire est totalement désertique.
Le Sahara occupe en effet la majeure partie du territoire égyptien, même si quelques oasis apparaissent ça et là. La pluviométrie est également très faible. L’eau apparaît donc comme une ressource très rare en Egypte. Ainsi, les possibilités de développer l’agriculture sont minces en Egypte, qui est d’ailleurs l’un des tous premiers pays importateurs de denrées alimentaires dans le monde avec une balance commerciale négative de près de cinq milliards de dollars en 2008. L’espace situé à proximité du Nil est en effet largement disputé par les habitations humaines (l’Egypte compte 82 millions d’habitants) qui ne laissent guère de place aux plantations, malgré les eaux riches en limons du fleuve qui rendent les terres alentours très fertiles. Enfin, l’agriculture est aussi concurrencée par le tourisme, secteur très consommateur en eau du fait d’étrangers habitués à la société de consommation dans laquelle ils vivent, et souvent peu enclins à éviter le gaspillage.
Or, les défis à venir sont immenses pour l’Egypte : la population, en pleine croissance, risque d’atteindre les 127 millions d’ici 2050. La lutte pour l’accès à l’eau risque donc de s’accroître, alors même que des millions d’Egyptiens n’ont pas d’accès à l’eau potable. Remarquons par ailleurs que l’habitat spontané, très développé par exemple dans la région du Caire, ne favorise pas la construction de réseaux d’approvisionnement en eau ou de réseaux d’assainissement. Par conséquent l’eau est aussi à l’origine de nombreuses maladies dans le pays, et entraine également la prolifération des moustiques.
Du stress hydrique en Egypte aux tensions internationales
L’eau, déjà au cœur d’enjeux sociétaux et environnementaux majeurs dans le pays, risque d’être à l’origine de fortes tensions dans le pays mais aussi au-delà des frontières égyptiennes. En effet, si l’Egypte n’a pas achevé sa transition démographique, il en va de même pour les pays situés en amont du Nil et notamment l’Ethiopie (dont la population pourrait dépasser les 144 millions en 2050) et le Soudan. Ainsi, pour pouvoir alimenter d’immenses terres en vue d’accroître leur production agricole, ces pays ont entrepris la construction de nombreux barrages, ce qui a pour effet de limiter le débit du Nil à l’entrée en Egypte.
Or, la législation internationale est encore balbutiante et n’indique pas dans quelles mesures l’intégrité d’un fleuve doit être respectée : certains pays, situés plutôt en aval, réclament la conservation totale de l’intégrité des fleuves, alors que ceux situés en amont prétendent que chaque pays est libre de pouvoir utiliser les ressources se trouvant sur son sol selon son bon vouloir. Les dissensions entre l’Egypte et les pays en amont du Nil risquent donc de croître encore davantage, et certains envisagent la possibilité d’une guerre pour l’eau dans cette région.